Validation des compétences : Des éléments novateurs intéressants !
Il faut se faire à l’idée que l’école n’a plus le monopole de l’apprentissage. Elle est évidemment tout à fait indispensable, c’est un outil primordial d’apprentissage des connaissances de base, qui doit être préservé, renforcé, amélioré mais tout un chacun doit bien se rendre compte que, pour les apprentissages professionnels, l’école n’est plus le seul lieu d’apprentissage de ces savoirs-faire. La technicité des machines, la complexité des process, le high-tech ne permettent plus à l’école d’être à la pointe de la formation dans différents domaines techniques.
Les professionnels, surtout dans des domaines où le savoir-faire gestuel et le savoir être sont essentiels, acquièrent, de par leur propre évolution et leur parcours au sein de la profession, des compétences dans leur métier et même dans leur vie active au sens général, compétences que l’école ou d’autres opérateurs d’apprentissages formels ne peuvent plus offrir.
Dans les entreprises, les travailleurs suivent des formations proposées par l’employeur. Tous ces investissements concédés par ces derniers permettent aux travailleurs d’acquérir plus de compétences pointues dans leur domaine professionnel. Mais, ces compétences ne sont pas reconnues par une certification « officielle », elles n’existent pas officiellement et donc pour un travailleur, il est difficile de faire valoir, en dehors de son entreprise, ses compétences, soit lorsqu’il souhaite accéder à des formations supplémentaires, soit lorsqu’il souhaite accéder à des fonctions particulières dans l’entreprise, soit quand il souhaite changer d’entreprise.
La validation des compétences est la reconnaissance de l’investissement que les travailleurs font dans leur propre métier. C’est, de plus, la possibilité d’augmenter son accessibilité à l’emploi, soit de maintenir son emploi, soit d’augmenter sa mobilité professionnelle horizontalement en changeant d’entreprise dans la même fonction, ou verticalement en accédant à d’autres fonctions dans l’entreprise.
En cas de perte d’emploi, la validation des compétences peut permettre d’accéder à d’autres emplois dans le même secteur, voire dans des secteurs similaires et de prouver à travers le titre reçu que le travailleur maîtrise effectivement les compétences requises pour le métier.
Dans la problématique de la validation des compétences, un autre élément intéressant et important est la méthode de validation. Les épreuves de validation ne sont pas organisées comme « à l’école » mais visent à mesurer réellement et pratiquement les compétences des gens dans leur métier et ce, lors de véritables mises en situation réelle. Chaque candidat sera mis, seul, face à une situation problème spécifique à son métier qu’il devra résoudre, par exemple, à un maçon on donnera de l’eau, du sable et une truelle, à un menuisier, des planches,… Personne n’est devant une feuille de papier, le candidat se trouve dans une situation concrète qu’il rencontre tout au long de son métier. Il n’est guère impressionné par les difficultés autres que celles propres à sa profession, pas de difficultés supplémentaires liées à l’écriture, on n’est pas dans le monde de l’abstrait, on est dans le monde du concret. Cette façon de procéder à l’évaluation des travailleurs donne une chance réelle à tous ceux qui n’ont pas eu l’occasion de suivre un cursus scolaire complet.
Un autre élément aussi important : l’évaluation des compétences se situe dans la logique de la deuxième chance. Le travailleur qui n’a pas réussi à décrocher un diplôme lors de son cursus scolaire traditionnel, peut durant sa vie active, acquérir de nouvelles compétences, les faire valider et est en droit d’obtenir un diplôme en dehors de l’école. Avoir à la fois une reconnaissance officielle de ses savoirs acquis tout au cours de sa vie et une certification officielle de ces savoirs sont les atouts de la certification car, quoi qu’on en dise, la culture du diplôme reste vive. La validation permet au travailleur « validé » d’accéder à des formations complémentaires pour compléter sa progression.
A qui s’adresse cette validation des compétences ?
Pour ce qui concerne le public ciblé par la mesure, dès l’origine, le centre de validation des compétences et les partenaires sociaux voulaient que ce soit à la fois pour les demandeurs d’emplois et pour les travailleurs actifs mais dans l’esprit même de la validation, l’expérience de travail et la maîtrise du métier acquises durant quelques années restent indispensables.
Les statistiques de 2008 montrent qu’il y a 51 % de travailleurs actifs avec plus d’un candidat sur deux porteur d’un CESS ou équivalent. Sur les 985 inscriptions, il y a eu 8,5 % d’abandons et 67,5 % de réussite.
Dans le chef des entreprises, la validation des compétences présente un intérêt en terme de connaissances réelles des compétences du métier de la personne qu’elle engage. Celle-ci est porteuse d’une qualification très clairement définie et dont les savoirs sont garantis par le titre qu’elle porte.
Cette adhésion au dispositif de validation des compétences est et doit rester une démarche libre, volontaire et gratuite. Il ne peut être acceptable qu’un employeur impose d’une manière ou d’une autre à son personnel de passer une épreuve de validation de ses compétences. Cette façon de faire s’apparenterait à un mécanisme pervers qui peut devenir à la limite du tolérable, un mécanisme d’exclusion.
Les épreuves : conception
L’originalité dans la conception des épreuves est le maître mot, tout en respectant les règles de l’art du métier choisi.
Au début du processus de validations des compétences, les métiers en pénurie étaient les métiers ciblés, c’était une des originalités du système. Aujourd’hui, comme on ne sait plus trop bien quel métier est en pénurie, ce sont les secteurs qui présentent les métiers aux comités directeurs.
Si le métier est accepté, un long parcours de certificat s’installe avec la participation au sein de la CODA non seulement des différents partenaires sociaux mais également des partenaires de la formation comme les réseaux d’enseignement, le Forem,… Une description complète du métier, une analyse pointue des connaissances nécessaires à ce métier sont réalisées, et les profils de qualification et (ensuite) de formation sont élaborés par la CCPQ.
Se pose enfin la question de la mise en place pratique de l’évaluation des connaissances : les épreuves de certification dans des centres de validation.
Un long procédé de validation de ces épreuves par les métiers, la certification des lieux où se dérouleront les épreuves (les centres de validation des compétences) s’organisent. Tous ces contrôles et validations font l’objet du travail du centre de validation des compétences (CDVC). Appel est fait à des organismes privés (AIB,…) pour contrôler les mesures de sécurité prises, le respect des procédures,… Tâche de contrôle garantissant la sécurité des personnes tout au long de l’organisation de la validation.
Ces centres, chacun spécialisé dans une famille de métier, sont répartis territorialement entre Bruxelles et la Région Wallonne (pour la coiffure : Bruxelles, Liège et Charleroi). Parfois, vu l’importance du métier validé, plusieurs centres sont présents en Communauté Française (par exemple 3 pour la coiffure : Bruxelles, Charleroi et Liège).
Au terme des épreuves, la remise d’un document officiel au candidat, reprenant les différentes compétences maîtrisées, concrétise la réussite de la validation. C’est ce document officiel que le candidat peut présenter à l’employeur en faisant valoir sa qualification en différentes compétences dans le métier choisi.
Des tensions entre travailleurs et patrons ?
La définition des métiers s’est fait en collaboration patrons et représentants des travailleurs. Lors de cette définition des métiers dans le domaine de la chimie, différentes tensions sont apparues.
Une première tension est née lors de la dénomination du métier. Les patrons pensaient d’abord en termes de métiers de maîtrise comme par exemple technicien de production, alors que les représentants des travailleurs visaient plus la production comme par exemple opérateur de formation. Ce sont des métiers semblables, proches l’un de l’autre, du point de vue des compétences à maîtriser mais il existe une dimension symbolique différente entre les deux termes. L’opérateur de formation est une fonction bien connue dans le monde ouvrier et ne génère pas, dans le chef de certains candidats, ouvriers non diplômés, des craintes, des freins. Par contre, l’épreuve mettant en jeu la notion de technicien génère l’image du technicien, ce qui peut faire penser que l’épreuve dépasserait leurs compétences, que ce serait trop « dur » pour eux. Pour les syndicats, l’objectif est que la validation serve à ceux qui n’ont pas de diplôme. Donc…
Un deuxième élément de tension entre patrons et représentants des travailleurs est évidement la description du métier. Faut-il viser haut ou viser bas ? En effet, il existe des différences significatives entre un métier pratiqué dans une entreprise avec le même métier pratiqué dans une autre. Le métier « Opérateurs de production », n’est pas du tout le même chez Solvay que dans une PME. Le problème posé est de savoir si l’on va aligner le niveau d’exigences sur Solvay ou sur la PME ! Les syndicats demandaient l’alignement sur la description du métier la moins contraignante, les patrons visaient l’écrémage par le haut. Le compromis commanda de placer la « barre » entre les deux niveaux d’exigence.
Un troisième élément de tension est l’épreuve proprement dite. Faut-il des épreuves très sélectives ou pas, tellement compliquées que peu de candidats réussiraient et qu’elles deviendraient en fait un système d’écrémage et de sélection supplémentaire ? La question essentielle est : « Que vise-t-on ? Est-ce identifier le top du top des opérateurs de production ou reconnaître le métier dans son exercice normal ? ». Les partenaires sociaux sont arrivés à la définition du professionnel compétent. Ce n’est pas le « top du top » mais ce n’est pas non plus le niveau d’entrée dans le métier.
Les métiers !
Le choix des métiers est arrêté par le CODA. Le CODA et tous les autres dispositifs (CCPQ ) répondent aux demandes des partenaires sociaux qui exigent la plus grande transparence dans le dispositif. A ce sujet, Monsieur Alain Kock, directeur de la CVDC, et la CVDC veillent particulièrement à cette transparence. Chacune des personnes concernées par la certification des compétences peut suivre tout le processus de A à Z à tout moment.
Et les relations avec les opérateurs de formation, l’école en particulier ?
Au début de la certification, il y a eu la question du monopole de la délivrance des diplômes, question qui est d’ailleurs revenue sur le terrain récemment. Jusqu’à présent, c’est la Communauté Française de Belgique qui certifiait et quelques enseignants se sont sentis « menacés » par la certification hors de l’école traditionnelle. En réalité, il ne s’agit pas de dire que, pour un jeune qui ne va pas bien à l’école, la solution est de passer à la validation des compétences pour obtenir un diplôme. Ce dispositif ne s’adresse pas aux étudiants, il s’adresse aux travailleurs ou aux personnes qui ont déjà acquis une expérience professionnelle certaine. Ce n’est pas donc vraiment en concurrence avec le monde de l’enseignement.
Il faut bien reconnaître que le dispositif a du mal à démarrer. Actuellement, il y a plus ou moins 1000 personnes qui ont décroché leur certification de leur métier. Nous nous considérons toujours dans une phase de démarrage. Nous avons dû tout inventer : créer des métier, certifier des centres de validation, créer des épreuves. Maintenant tout est en place, il faut que le système décolle, c’est la raison de l’envoi d’un memorandum aux différents partis. Nous devons obtenir des moyens et un cadre législatif qui permettant d’offrir plus de métiers, plus d’épreuves de validation à plus de candidats.
L’aspect à privilégier aujourd’hui : développer les contacts avec les travailleurs. Ces derniers sont très enthousiasmes par rapport à la certification car ils savent que dorénavant, grâce à la validation des compétences, ils peuvent, en valorisant leur expérience acquise, accéder à l’emploi supérieur, malgré leur absence de diplôme.
Dans le contexte actuel de crise et précarité de l’emploi, c’est un « plus »
Lorsqu’un patron doit choisir entre deux ouvriers, il sera plus disposé de choisir celui qui va présenter réellement, concrètement les capacités de l’emploi. Ici, la certification des compétences acquises jouera son rôle de « booster » à l’emploi. De plus, la certification dans un centre de validation externe à l’entreprise « casse » l’arbitraire du patron. Les compétences, si elles existent dans le chef de l’employé, sont effectivement reconnues par la commission, validée par un document, permettant ainsi à l’employé d’accéder au poste pour lequel il est réellement capable. L’émancipation de la personne passe par l’étude et la formation tout au long de la vie. La validation des compétences participe à ce processus facilitant la repositionnement de l’être humain actif au son de son groupe de vie, de son milieu culturel, de la où il est et où il veut continuer à grandir. La validation des compétences participe à cette volonté.
Divers sites offrant des compléments d’information sur la CDVC,… :
http://www.ftu.be/documents/ftu-bxl/Validationdecompet.pdf
http://www.alterechos.be/index.php?p=sum&d=i&c=a&lpn=unsetted&art_id=19608&n=288&l=unsetted
http://www.fgtbbruxelles.irisnet.be/site/fr/syndicats/Files/synd031106/