Sésame, Musée ouvre-toi ! » : une invitation au musée pour tous I

découverte des outils à destination des acteurs sociaux et de leurs publics

« Au musée, j’ai appris les histoires qui sont peintes. Parfois, c’est long mais c’est bien pour apprendre. C’est une façon d’enregistrer l’histoire et puis je peux le dire aux autres. C’est apprendre et puis passer. Quand j’irai avec mes filles, c’est moi qui ferai passer ce que je connais. » (Aziza)[1]

Tout au long de l’année, à travers ses programmes, l’équipe éducative (EducaTeam) des Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique (MRBAB) propose aux acteurs et relais sociaux de découvrir l’éventail de ses animations « Musée sur mesure ».

Les activités du programme Sésame sont tout particulièrement destinées à des publics éloignés des musées pour des raisons sociales, culturelles et économiques. Petit tour d’horizon des différents outils à disposition des travailleurs sociaux, des éducateurs, des animateurs et de toutes les personnes qui encadrent des publics fragilisés ou défavorisés.

Aller au musée

Dans la dernière radiographie des loisirs culturels en Communauté française de Belgique, on peut y lire qu’en 2007, 49 % des francophones ont participé à une activité qui relève des arts d’exposition (visites aux musées, galeries d’art, expositions d’arts plastiques ou de photographies). Mais, il y a bien un mais, on peut aussi trouver ceci : « L’analyse de la fréquentation des arts d’exposition montre chez les spectateurs une faible différenciation économique mais une profonde fracture intellectuelle : 41 % des visiteurs sont diplômés du supérieur contre 9 % à peine du primaire. »[2]

Si la culture est de plus en plus ouverte à tous, faire le pas d’aller au musée reste difficile ! Et pourtant, y avoir accès, c’est découvrir tout un univers, pas si éloigné des trajectoires d’insertion : « La culture, c’est ce qui est construit, et qui permet donc de se situer face aux modèles proposés ; la culture, c’est ce qui construit ; la culture, c’est ce que l’on construit : il est donc logique que la culture soit mise à contribution dans les pratiques de l’insertion sociale qui, au sens anthropologique du terme, signifie trouver sa place au sein d’une culture. »[3]

Dans une étude réalisée en Irlande en 1998, François Matarasso raconte que « (…) 80 % des gens ayant pris part à [des] projets culturels sentaient qu’ils avaient acquis de nouvelles compétences. (…) En effet, ces compétences, parmi celles qui ont été citées, sont ce qu’on appelle aujourd’hui des qualités transmissibles – c’est-à-dire des connaissances qui peuvent s’adapter aux divers besoins de situations ou d’emplois différents. »[4]. Permettre aux publics fragilisés ou défavorisés d’accéder aux musées, ce n’est pas seulement leur donner accès à la culture mais c’est également leur donner l’occasion d’acquérir des compétences précieuses dans la vie de tous les jours, c’est aussi leur ouvrir les portes d’un lieu pour se reconstruire. « La culture, les savoirs-faire artisanaux, l’art mis en œuvre, l’acte de création en équipe, le sens du beau ne sont pas des cerises sur un hypothétique gâteau, mais bien plutôt les premiers pas nécessaire d’une démarche de (re)construction de personnalités éclatées, ou trop abîmées pour s’intégrer. »[5]

Les témoignages de participants au programme Sésame confirment cette démarche. Aller au musée, ce n’est pas uniquement voir des œuvres, c’est aussi parler de sa culture, découvrir une autre culture, avoir un regard différent sur les choses, c’est apprendre, transmettre, créer : « (…) Avant, quand j’étais au Maroc, je ne connaissais pas beaucoup ce qu’il y avait de beau dans mon pays. Depuis qu’on a été au musée, je fais attention aux artistes de mon pays dans les émission de télé. On a aussi des femmes qui font de belles choses. Des choses incroyables ! Je ne savais pas qu’on avait tout ça. Ces mains qui travaillent, ce sont vraiment des mains d’or. Je suis fière de voir cela. Ce n’est pas tellement des tableaux que je vois chez nous mais des tapis, de la broderie, le henné. Tout cela on le fait aujourd’hui et on le faisait avant. C’est cela la culture. » (Halima).[6]

Les rencontres Sésame

Pour concrétiser cette venue au musée des publics précarisés et des personnes qui les entourent, les Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique se sont donnés comme formule : « Sésame, Musée ouvre-toi ! ».

L’équipe du programme Sésame, coordonnée par Anne Querinjean, propose plusieurs fois par an une présentation gratuite des activités possibles aux musées.

Durant cette rencontre à destination des personnes qui encadrent au quotidien des publics fragilisés ou défavorisés, l’animateur(rice) expose l’éventail des découvertes à faire dans les musées, montre les outils élaborés par le service éducatif et aborde les aspects pratiques (prix, réservations, démarches, art. 27, etc.). Ensuite, place au terrain ! La visite d’un des musées (Musée d’Art ancien et Musée d’Art moderne ou Musée Magritte) permet de se faire une idée des possibilités offertes, selon les publics (enfants, adolescents, familles, élèves d’une école d’alphabétisation, etc.), les activités choisies et les objectifs de la future visite.

Cette première rencontre avec les responsables de groupe est cruciale, elle permet d’évaluer les possibles, de se rendre compte des moyens à mettre en place, de commencer à penser concrètement son projet, en fonction de son groupe, elle permet aussi de croiser d’autres acteurs de terrain, d’échanger des expériences. Sans la motivation et l’implication du responsable de groupe, les participants et le(la) guide auront beaucoup de mal à entrer dans la démarche.

Les visites « hors les murs »

Faire venir les musées dans les lieux de vie, voilà le projet proposé par les visites « hors les murs ». Une personne de l’équipe Sésame/EducaTeam se rend dans les associations, les écoles, les institutions sociales, avec une valise. Adaptée à tous les publics, cette valise (différente selon les musées) contient de quoi introduire la future visite, donner le goût de venir au musée, créer de nouvelles représentations et inclut de petits ateliers créatifs. La personne qui animera cette rencontre sera également celle qui guidera le groupe lors de la visite au musée. Une première rencontre qui permet de créer du lien entre le(la) guide et les participants, une occasion de dépoussiérer l’image du musée, de construire une relation de confiance pour offrir les meilleures conditions de visite par après.

Les ateliers

Préparer la visite, vivre l’expérience au musée et après ? Le jour de la visite, durant les vacances scolaires, sur demande, des ateliers sont organisés aux musées pour prolonger les découvertes : « A l’atelier où on a pu peindre, j’ai fait deux tableaux. Le premier, le grand, peint avec le brun, c’est ce qu’il y a en moi. Tout (émotion). C’est la haine, la tristesse, la vie que j’ai eue. La deuxième feuille, c’est la vie avec les couleurs. Je dessinais avec la musique. Je monte, je descends, je remonte de nouveau… Ces couleurs, c’est vraiment la vie. La vie que j’ai aujourd’hui, ce n’est pas rose mais j’essaie de vivre le mieux que je peux. ». (Aziza)[7]

Musée sur mesure

Le programme Sésame fait partie des activités « Musée sur mesure » d’EducaTeam. D’autres programmes en font aussi partie : Équinoxe (à destination des personnes aveugles ou malvoyantes), Comète (à l’attention des personnes à mobilité réduite ou ayant des problèmes de santé mentale) et Langue des signes (à destination des personnes sourdes ou malentendantes).

En fonction des publics, ces programmes adaptent les visites, les ateliers et les parcours créatifs, selon les besoins et les projets des acteurs de terrain.

Revenir au musée

Découvrir le musée, participer à un atelier, le vivre en groupe, au sein de son institution, mais aussi emmener ses proches à partager cette expérience : « Si je rencontre quelqu’un qui n’a jamais été dans un musée, je lui dis qu’il doit y aller. Je lui dis « Va voir ! ». Pour lui dire que ça vaut la peine, je lui raconte ce que j’ai vu. Peut-être, je lui dirai « Viens avec moi » (Halima)[8].

Le programme Sésame propose aux personnes qui ont bénéficié du programme et qui souhaiteraient revenir un outil, « Passe-partout », composé d’une série d’activités à réaliser au musée, une manière d’accompagner les visites suivantes, sans la présence d’un(e) guide.

Quelques outils pour se faire une idée

  • Regards croisés d’Ici et d’Ailleurs aux Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique, une publication du programme Sésame et d’EducaTeam qui présente les méthodes, les moyens du projet et toute une série de récits de visites et d’acteurs des musées. Un outil à utiliser avec les usagers, les élèves pour préparer un projet autour du musée. Document disponible gratuitement auprès de Sésame sesame@fine-arts-museum.be
  • Le musée en mots, un petit carnet réalisé par EducaTeam en partenariat avec une école d’alphabétisation : tout le vocabulaire nécessaire (avec des images) pour comprendre le fonctionnement du musée et préparer une visite avec des personnes qui maîtrisent moins bien la langue française. Document disponible gratuitement auprès service EducaTeam. Lire la suite
Informations pratiques

Prochaines rencontres Sésame :

  • mardi 20 avril 2010 à 10h (Musée Magritte) ;
  • jeudi 22 avril 2010 à 14h (Musée Magritte) ;
  • mardi 12 octobre 2010 à 10h (Musées d’Art ancien et d’Art moderne) ;
  • jeudi 14 octobre 2010 à 14h (Muses d’Art ancien et d’Art moderne).

http://www.fine-arts-museum.be/site/fr/frames/F_educatif.html : le programme complet des activités d’EducaTeam.

http://www.musee-magritte-museum.be : les activités pédagogiques d’EducaTeam au Musée Magritte.

http://www.extra-edu.be : le site internet d’EducaTeam, avec des dossiers, des pistes de réflexion autour des collections des MRBAB et même (prochainement), une galerie des créations des participants au programme Sésame.

Anne Querinjean (Coordinatrice du Programme Sésame) Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique Rue du Musée 9 1000 Bruxelles sesame@fine-arts-museum.be Sésame : 02 508 33 55 EducaTeam : 02 508 33 33 Réservations : Marguerite Vermandere (mercredi-jeudi-vendredi) : 02 508 33 53 marguerite.vermandere@fine-arts-museum.be

Bruxelles, le 23 février 2010, Musées Royaux des Beaux-Arts de Bruxelles (MRBAB)

Références

[1] Extrait de « Regards croisés d’Ici et d’Ailleurs aux Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique », p. 11.

[2] Guérin, M., « Pratiques et consommation culturelles en Communauté française », in Le Courrier hebdomadaire du CRISP, 2009, 2031-2032, p. 4. ()

[3] Bernard, J.-L. (coord. par), « Création artistique et dynamique d’insertion. Colloque transnational », Paris, L’Harmattan, 2001, p. 7.

[4] Matarasso, F., in Bernard, J.-L. (coord. par), « Création artistique et dynamique d’insertion. Colloque transnational », Paris, L’Harmattan, 2001, p. 83.

[5] Bernard, J.-L. (coord. par), « Création artistique et dynamique d’insertion. Colloque transnational », Paris, L’Harmattan, 2001, p. 8.

[6] Extrait de « Regards croisés d’Ici et d’Ailleurs aux Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique », p. 10.

[7] Extrait de « Regards croisés d’Ici et d’Ailleurs aux Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique », p. 12.

[8] Extrait de « Regards croisés d’Ici et d’Ailleurs aux Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique », p. 11.

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